350/500cc

Avertissement au lecteur: Les renseignements qui sont donnés ci-dessous concernent les différents types de 350 et 500 Laverda dans leur globalité. L’usine utilisait toutefois de façon occasionnelle mais assez récurrente des pièces différentes dans une même série notamment en fonction des aléas d’approvisionnement de la part des sous-traitants. Il n’est donc pas rare que des motos d’une série ultérieure aient été équipées d’éléments moteur ou chassis d’une série plus ancienne, ou que deux motos d’une même série soient légèrement différentes, cela n’étant en aucun cas une preuve de non originalité du modèle.

Photos soumises à copyright (Usine Laverda, Famille Laverda, G. Sperotto, JL Olive, reproduction interdite sans autorisation des propriétaires des droits)

La 500cc (ou Alpino ou Zeta), 1977 – 1982

En Septembre 1975, Laverda présente un prototype d’un petit 500 twin dont l’idée remonte à fin 1973. Il s’agit d’un bicylindre de 497 cm3 ressemblant apparemment beaucoup au triple de la marque. Mais ce n’est qu’une apparence car ce moteur utilise des techniques résolument modernes pour rivaliser à armes égales avec les nouvelles 500 Japonaises: 4 soupapes par cylindre, double arbre à cames en tête, calage à 180°, allumage électronique, boîte 6 vitesses, poids plume de 171 kg soit près de 40 kg de moins que celle que la presse présentait comme sa concurrente directe, la Yamaha 500 XS…

Bien né et sans tare majeure, ce prototype mit cependant un certain temps à être distribué du fait de certaines difficultés de la petite usine de Breganze à assumer de front plusieurs projets majeurs (la 750 et la 1000 étaient en plein essor) et surtout en raison de l’apparition en 1975 d’une nouvelle réglementation fiscale italienne, taxant lourdement (35% au lieu de 18%) les motos de plus de 350cc. Par ailleurs, une inflation galopante rendait les motos Italiennes difficiles à vendre à l’exportation, tout cela limitant le succès de cette moto pourtant particulièrement réussie et performante, reconnue comme telle par la presse spécialisée.

De fait, le deuxième prototype de la 500, quasiment abouti, ne fut présenté au public qu’en 1976 au salon de Milan et celui de Paris.

La présentation du projet 500 au salon de Paris en 1976. Il s’agit de la version quasiment définitive, seul le carter d’allumage et le couvre culasse démontrent qu’il s’agit d’un prototype.

Enfin, le modèle définitif fut commercialisé à partir de 1977, son appellation commerciale étant « 500 » partout en Europe sauf en Angleterre où elle prit le surnom de « Alpino » et aux USA où elle fut appelée « Zeta ».

Ce premier modèle était proche du prototype de 1976. Le carter primaire comportait un logement pour l’allumage de forme plus conventionnelle et le couvre-culasse était différent.
Sur le papier ainsi que lors des essais, la 500 Laverda était vraiment une solution crédible pour concurrencer les machines Japonaises et prenait d’ailleurs souvent l’avantage lors des essais comparatifs. Elle était techniquement très sophistiquée, agréable à conduire, vive et légère, tenant très bien la route, le moteur était nerveux et capable de monter rapidement dans les tours, il n’y avait que des éloges à faire de cette moto.

L’usine fut donc profondément affectée par le mauvais sort qui s’acharnait sur ce petit bijou, en dépit de tous les efforts qu’elle avait déployés pour concevoir une machine exceptionnelle, première moto a être proposée avec 4 soupapes par cylindre, première moto Italienne dotée d’une boîte à 6 vitesses, légère et sportive, mais en même temps polyvalente… La fiscalité propre aux grosses cylindrées, le cours de la lire Italienne et même un certain manque d’identité par rapport aux autres produits de la marque contrarièrent très fortement son succès potentiel… Le magazine américain Cycle Guide titra même « The world’s most expensive 500cc roadster » (la 500 de route la plus chère du monde).
Un certain salut vint toutefois d’Espagne où la politique protectionniste vis à vis des produits Japonais favorisa la vente de la 500 Laverda.

Bien que la moto était déjà particulièrement aboutie, l’usine adapta len milieu d’année suivante un balancier d’équilibrage afin d’annuler toute vibration. La présence de ce balancier était visible par la forme particulière du carter primaire, qui comportait un bossage supplementaire. Le réservoir (plus svelte) et la décoration générale évoluait également. Cette nouvelle version fut parfois appelée « 500 S » suivant les pays d’importation. A noter une petite modification des paliers d’arbres à cames extérieurs qui devinrent lisses à la place des roulements à aiguilles, ce changement ayant pour unique raison la diminution des bruits de fonctionnement, la fiabilité entre les deux systèmes étant identique.

Adaptation du balancier d’équilibrage, identifiable au bossage sur la partie AV supérieure du carter primaire.

La même année, afin de contourner le problème de lourde taxation de la 500, une 350cc est produite. Pour des questions d’économie, alors que le projet 500 avait déjà largement souffert des vicissitudes imposées par les Autorités Italiennes, la 350 était directemet dérivée de la 500. Même cadre, même base moteur (seul l’alésage différait, passant à 60mm avec des pistons basse compression au lieu de 71mm), les seules différences techniques mineures étant les carburateurs (de 24mm), les pipes d’admission (plus petites et sans goussets de renfort), les tubes d’échappement (plus petits et sans tube d’équilibrage sur la 350, référence 63101026 sur la 500, réf. 63101035 sur la 350), un pignon de sortie de boîte de 14 dents au lieu de 15, et enfin le n° de moteur sur le carter ne comporte pas le type et le n° d’homologation DGM sur la 350.
La 350 était une bonne machine, fiable, mais aux performances en net retrait par rapport à la 500 à cause d’un poids identique à emmener. Mais son prix était beaucoup plus abordable et en conséquence directe elle se vendit mieux en Italie que sa grande soeur, et également en Espagne. L’usine proposa d’ailleurs dès 1979 un kit 400cc à l’attention des propriétaires de 350.

La 350cc, en tous points identique à la 500 sauf quelques menus détails, créée avant tout pour contourner la super-taxation italienne des modèles de plus de 350 cc.

Les excellentes aptitudes de la 500 Laverda pour la course incitèrent naturellement l’usine à créer des modèles compétition, comme la 500 Formula qui sera l’objet du prochain chapitre. Sur les mêmes bases de préparation (il est remarquable d’observer que, contrairement à la 750 SFC par rapport aux 750 de série, les machines de course restaient très étroitement dérivées des machines de série avec notamment un chassis identique et beaucoup de pièces moteur communes), l’usine développa une moto de curse qui fut engagée aux 24 heures de Barcelone. Pilotée par Augusto Brettoni et Pete Davies, elle remporta la course dans sa classe, sans aucun problème de fiabilité.

Augusto Brettoni, en route vers la victoire en classe 500 aux 24 heures de Barcelone.

Laverda réédita l’exploit en 1979, avec la même moto et les mêmes pilotes!

La 500 s’illustra également en remportant dans sa classe le tour de France moto (pilote Georges Fougeray) et aussi au TT, notamment sous sa version Formula, objet du prochain chapitre.

La 500 poursuivit sa carrière jusqu’à début 1982, la plupart des derniers modèles vendus ayant été construits en 1980.

Compte-tenu des qualités de la 500, qui brilla d’ailleurs en compétition (voir chapitre suivant), l’obstacle que fut l’apparition peu de temps avant sa commercialisation de la fameuse sur-taxe italienne est toujours considéré comme un immense gachis.

Mais la 500 prit sa revanche beaucoup plus tard, puisque c’est le moteur de cette dernière qui servira de base de travail aux modèles 650 et 750cc produits dans la nouvelle usine de Zane jusqu’au début des années 2000, presque 30 ans après sa conception originelle!

Production des 500 et 350

TypeAnnéeProduction
5001977 – 19822750
3501978 – 19802280

La 500 Formula (1978 – 1980)

Outre le fait que Laverda a toujours eu du succès avec ses modèles les plus exclusifs, malgré leur prix élevé, la 500 avait d’emblée un très grand potentiel sportif. Son moteur fiable et très évolué pour l’époque permettait un haut niveau de développement et il était logique que Laverda proposa une version sportive de son nouveau modèle.

Cette version fut conçue dès le mois de Novembre 1977, présentée à la presse le 22 janvier 1978 et une première série de 75 machines fut produite en Février et Mars de la même année.
Le principe était de concevoir une moto de course très étroitement dérivée de la 500 de base, de la construire en série limitée et de créer un championnat mono-marque qui s’appellera « Coppa Laverda », idée suggérée par le champion Augusto Brettoni.

Autour du cadre de série, on fait appel au spécialiste italien Motoplast pour l’habillage monocoque en polyester et on prépare le moteur avec des pistons comprimant à 10,5/1, des arbres à cames racing baptisés « S1 », des échappements libres, une pompe à huile à gros débit et une boîte de vitesses à rapports courts. Des pneus Pirelli Gordon sont montés.

Ainsi préparée, la Formula développe 52 cv à 9500 T/M et pèse 154 kg, un excellent rapport poids puissance qui permet une vitesse de pointe de 220 km/h et surtout qui rend la machine très vive alors qu’elle est déjà agile d’origine, particulièrement à l’aise sur les circuits sinueux, y compris au TT où elle brillera par ses qualités.

Ces motos n’étaient pas immatriculées (réservées à la course pure) mais l’usine fournissait au besoin un kit routier et un dossier d’homologation si un propriétaire voulait l’utiliser sur route ouverte. Elles ne coûtaient que 10% de plus par rapport au modèle de série (3 000 000 lires).

Pour aider les participants de la Coppa Laverda, l’usine proposait les pièces de rechange à prix réduits: Les piston coûtaient 13 200 lires pièce, les arbres à came 35 600 lires ( admission ) et 31 200 lires ( échappement ), le carénage 43 000 lires, la coque réservoir/selle 81,000 lires, le tachymètre 25 000 lires, les pneus coûtent environ 30.000 lires chacun .
De plus, l’usine faisait déplacer à chaque épreuve un camion avec des pièces rechange en cas d’avarie, ce qui évitait aux participants de se constituer un stock d’avance.

Fin Mars 1978, les 75 premières machines constituant la première série sont alignées dans la cour de l’usine et présentées à la presse.

Sortie de la première série de 500 Formula en Mars 1978.

La « Coppa Laverda » eut lieu quatre années de suite en Italie et en Belgique (1978, 1979, 1980 et 1981) et en Allemagne en 1979. Pour la première édition, le réglement prévoyait que els pilotes ne devaient pas avoir plus de 30 ans et n’avoir jamais été classé dans les 3 premières places d’un championnat national. Cette règle a été abolie pour les éditions ultérieures.

En 1978 également, la 500 Laverda fut engagée au TT sur l’île de Man et termina 6ème au général aux main de Pete Davies, également champion production sur Laverda 1000 Jota.

A la fin de la première saison, le bilan technique était excellent, mais il y eut juste une demande pour faciliter l’accès mécanique pour les opérations de maintenance, ce qui était rendu incommode à cause de la carrosserie monocoque. L’adoption d’un réservoir en acier séparé était par ailleurs une exigence pour le championnat en Allemagne. Laverda redessina donc la carrosserie pour les saisons suivantes, en utilisant un réservoir (celui de la 500 de série) et une selle séparés. Au niveau moteur, le modèle 79 reçut également un nouveau système d’échappement Sito. Une nouvelle série de 75 machines fut produite suivant cette configuration.

La Coppa Laverda a de plus en plus de succès et elle est organisée également en Allemagne, avec des sponsors différents.

Au TT, elle renouvelle son exploit (5ème place) aux mains du pilote Mick Hunt qui, comme Pete Davies, concourt également en championnat production sur Laverda Jota.

Pour 1980, la Formula restait identique au modèle 1979, mais avec certains sponsors différents. Certaines motos ayant été détruites lors d’accidents en 1978 et 1979, la question de la mise en refabrication de Formulas pour les saisons 1980 et 1981 se pose. Même si aucune information concrète n’a pu être obtenue à ce sujet, il ne fait pas de doute qu’une nouvelle petite série a été fabriquée en 1980.

La Laverda Ogier, victorieuse à Daytona en 1982, après avoir mené la course de bout en bout (pilote Alan Cathcart)

La 500cc Montjuic, 1979 – 1982

Boostés par les résultats sportifs de la 500 mais aussi désireux d’aider à son essor commercial, les importateurs de la marque pensèrent à juste titre qu’une version sportive destinée au grand public pourrait avoir un grand succès.

Il en fut ainsi en Autriche avec deux projets de 500 sportives, l’une dénommée S et l’autre SS, avec des cylindrées comprises entre 500 et 550 cc, et même 650cc avec un nouveau bloc complet, mais le risque financier ne fut finalement pas pris.
En Allemagne parc ontre, l’importateur Uwe Witt sortit la 500 « SFC », équipée au choix du client d’une selle de Formula, de 750 SFC, d’un carénage de 750 SFC, voire d’un moteur type Formula.

Mais c’est surtout en Angleterre que les choses devinrent beaucoup plus concrètes avec la production d’une machine sportive exclusive baptisée la « Montjuic », moto éponyme du circuit de Barcelone où la 500 venait de remporter la victoire de sa classe.

Equipée d’un moteur très proche de la Formula (arbres à cames S1, pistons haute compression et échappement SITO), elle était dotée d’une carrosserie spéciale avec selle de 750 SFC et petit carénage tête de fourche montés directement en Angleterre.

Pour comprendre le succès de la Montjuic, il faut tenir compte de deux faits majeurs: D’une part il y a toujours eu un engouement pour les Laverda spéciales produites en petites séries, celles-ci étant rapidement pré-commandées par une clientèle avides de machines d’exception (on peut même dire que ces séries spéciales ont largement contribué à rétablir les finances de l’entreprise, du moins jusqu’au début des années 80). D’autre part, à l’heure où la production moto s’aseptisait sérieusement, y compris d’une certaine manière au sein même des modèles de la marque, la Montjuic était la représentation typique de la moto « rebelle », antisociale par ses performances, son caractère et même son niveau sonore! Pour les mêmes raisons, elle rappelait la mythique Jota. Dans cette optique, elle n’était ni plus ni moins qu’une moto de course qu’on avait laché sur la route, homologuée on ne sait comment et capable de tenir la dragée haute à bien des superbikes contemporaines.

Fin 1981, la demande d’une nouvelle Montjuic, plus modernisée, fut si pressante que le modèle « MK2 » fut produit tout début 1982. On conserva son moteur toujours aussi expressif et performant, mais on modifia le carrosserie et l’aspect général grâce à un nouveau tête de fourche fixé cette fois-ci sur la cadre et un ensemble monocoque AR. Aussi incroyable que çà puisse paraître, l’échappement SITO avec ses 105 décibels faisait toujours partie de l’équipement sur simple demande!

La 600cc TT2

Vu les aptitudes sportives largement démontrées de la 500 Laverda et les catégories en course avec en toile de fond le championnat TT2, il était naturel que l’usine produisit un kit moteur de plus grosse cylindrée, en l’occurrence dans la classe 600cc.

Un premier kit fut proposé avec une cylindrée de 579cc, comprenant chemises, pistons, arbres à cames, soupapes et leurs ressorts et poussoirs, et le plus souvent un radiateur d’huile additionnel et des échappements spéciaux. Ce kit causa quelques problèmes de fiabilité à très haut régime en situation extrême, notamment à cause de pistons un peu trop lourds. Des pistons plus légers furent alors montés, simultanément à une augmentation supplémentaire de cylindrée à 596cc.
Des compagnies concurrentes proposèrent leur propre kit, avec à peu près les mêmes caractéristiques.

Le kit 600cc proposé par la société Turinoise Gammatron.

Pour le championnat, un nouveau cadre treillis très léger (8 kg) en tubes au chrome-molybdène fut créé et la moto était équipée des éléments les plus haut de gamme possible, suspensions magnésium, gros freins, toutes pièces allégées… Outre le kit 600cc, le moteur était préparé au maximum, délivrant suivant le cas entre 71 et 74 cv, pour une vitesse de pointe supérieure à 230 km/h.

La 600 TT2 s’illustra en championnat montagne qu’elle remporta en Italie en 1982 aux mains de Stefano Pagnozzi, mais aussi dans d’autres sortes d’épreuves comme le championnat Junior en 1984 avec un certain Augusto Brettoni (2ème derrière la Ducati de Barchitta), et également au TT où elle termina 4ème aux mains du pilote Malcolm Wheeler, à une moyenne de 161 km/h, moyenne qui fut encore améliorée l’anne suivante à 168 km/h, résultats remarquables compte tenu de l’âge de la moto et de sa cylindrée..